En Région Parisienne, la perception des Conseils Généraux
par les habitants est moins précise qu'en province.
En région Ile de France, les gens connaissent leur maire, la
Région commence un peu à être perçue et au
milieu, il y a le Conseil Général dont on ne sait pas
trop ce qu'il fait.
Le Conseil Général des Hauts de Seine est le plus important
de France. On dit qu'il est fort riche et c'est vrai que grâce aux
entreprises de ce département, il a des recettes importantes.
Ses domaines d'intervention sont les mêmes que les autres conseils
généraux, enrichis par les deux lois de décentralisations
de la voirie, en partie des transports et du logement, de l'enseignement
pour ce qui concerne les collèges et de l'aide sociale et la solidarité
qui représente une part fort importante du budget départemental.
Les lois de décentralisation nous ont d'abord apporté l'enseignement
(loi de Deferre) et la dernière nous a, surtout pour les départements,
amené le personnel technique lié au fonctionnement des collèges.
La technique est toujours la même : avec les lois de décentralisation,
l'Etat se débarrasse d'un poids financier sur les collectivités
territoriales. On nous explique qu'il va nous compenser ces dépenses,
ce qui est objectivement vrai et subjectivement faux. Par exemple avec
la dernière décentralisation des personnels TOS des collèges
(900 au première janvier 2006) : l'Etat va nous compenser à
hauteur de 900 alors qu'il est notoirement connu qu'il en faut à
peu près 1.800 pour que cela fonctionne correctement. Il y a clairement
une dépense supplémentaire pour les collectivités
locales.
Mon domaine d'attribution au Conseil Général est effectivement
" les collèges " mais nous débattons sur tout
et je peux donc répondre sur tous les sujets.
Sur le plan politique nous avons eu un Président de 1988 à
2004, qui était Charles Pasqua. Il a été remplacé
l'année dernière à l'occasion des élections
cantonales par Nicolas Sarkozy et je vous rassure tout de suite, il restera
Président du Conseil Général bien qu'il retourne
dans un ministère.
Avoir un Président de Conseil Général qui a une dimension
nationale et qui est un homme d'action et de pragmatisme pour un département
qui bouge est une bonne chose. Nous sommes donc très contents qu'il
reste, nous avons constitué une équipe autour de lui qui
fonctionne. Il était déjà ministre des Finances en
étant Président du Conseil Général et je ne
vois donc pas la différence maintenant.
Je voudrais surtout répondre à vos questions, parce qu'on
a souvent l'impression que les habitants ne perçoivent pas bien
dans leur vie quotidienne ce que fait le Conseil Général
et ce qu'il peut apporter dans la vie quotidienne de ses administrés.
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QUESTIONS
DES PARTICIPANTS
Q
: Une initiative sur Paris a réuni
toutes les associations concernées par le transport des handicapés.
Pourquoi rien n'est fait dans les autres départements?
R :
Tout d'abord nous considérons, y compris N. Sarkozy,
que dans le domaine des handicapés notre pays a vingt ans de retard
sur beaucoup d'autres pays.
On n'arrête pas de poser le diagnostic mais ensuite il faut trouver
des solutions. Dans notre département nous avons décidé
d'être très actifs sur le sujet et Nicolas Sarkozy a envoyé
des questionnaires très précis à l'ensemble des habitants
du département à la suite desquels nous avons fait des états
généraux et dégagé des priorités.
L'intégration des handicapés était vraiment la première
priorité, à tous les échelons car vous parlez des
problèmes de transports que nous ne maîtrisons pas mais nous
pouvons nous associer financièrement à toutes les entreprises
dans ce domaine. Cela va de l'accessibilité des bâtiments
départementaux à l'intégration des handicapés
en milieu scolaire normal avec l'ouverture d'UPI (Unité Pédagogiques
d'Intégration) dans les collèges mais nous avions beaucoup
de retard. Nous avons ouvert 14 UPI en un an et demi et j'espère
qu'il y en aura dans tous les collèges du département d'ici
deux ans. Mais hors de notre champ de compétence, nous ne pouvons
pas être initiateur et nous ne pouvons que cofinancer.
Q :
Pour parler
du transport des handicapés à Paris, le métro n'est
vraiment pas un exemple !
R : C'est
de la compétence du Syndicat des transports parisiens..
Nota
: si l'on consulte le site http://www.infomobi.com/, on se rend compte
que les stations métro et RER équipées pour les handicapés
sont surtout installées en banlieue et très peu à
Paris
Alors, entre les effets médiatiques et la réalité
!...
Q : Justement
là, on voit qu'il y a une scission entre la Région et les
Conseils Généraux. Les citoyens connaissent mal le fonctionnement
des structures locales et mériteraient de mieux être formés
à ce sujet.
R :
Nous
regrettons justement amèrement de n'être que des tiroirs
caisses pour le STIF (Syndicat des Transports de l'Ile de France), où
nous ne faisons que délibérer pour
payer, mais on ne nous demande absolument pas notre avis.
Sur ce sujet comme sur d'autres du même type, il y a ceux qui payent
et ceux qui décident. Ce ne sont pas forcément les mêmes.
Il faudra que chaque collectivité redéfinissent ses priorités.
C'était d'ailleurs l'objectif de cette deuxième loi de décentralisation
: elle redéfinit les domaines de chacun et on devrait s'y retrouver,
mais il y a les usages et chacun à voulu faire un petit bout de
la formation par exemple
Avec Sarkozy on a arrive mieux à
recentrer sur ce que sont nos compétences et à laisser faire
la Région ce qui est de son ressort parce qu'autrement on n'y arrive
plus.
Q :
Comment envisagez-vous
la santé scolaire dans les collèges ?
R : La
santé scolaire dépend normalement de l'Education Nationale
et le résultat est plus que médiocre de la maternelle au
lycée. Il est compensé par les collectivités dans
certains établissements. Par exemple dans les écoles maternelles
et primaires de Levallois, il y a des médecins scolaires (de l'éducation
nationale) et des infirmières qui sont du personnel communal rémunéré
par la ville.
Tout dépend des communes qui peuvent ou veulent le faire. Arrivé
au collège, il ne se passe plus rien. Parce que jusqu'à
maintenant je ne pouvais pas rentrer du personnel départemental
dans les collèges, domaine réservé au personnel de
l'Education Nationale.
Le personnel sanitaire qui devait être décentralisé
ne l'a pas été suite aux mouvements syndicaux seuls les
personnels techniques (agents de service) sont transférés.
Je crains que cela ait été une occasion ratée parce
qu'au niveau des collectivités locales, nous avons la pression
des parents et des administrés (et des électeurs). Nous
sommes beaucoup plus réactifs que l'Etat. On ne peut que regretter
la situation actuelle où il y a 1 médecin pour 5 collèges,
une infirmière pour 12
Dans les collèges faute de personnel compétent, il n'y a
pas de dépistage, pas de prévention, alors que les enfants
sont à l'âge compliqué de la pré-puberté
et puberté. Cela se passe plutôt bien jusqu'au CM2 puis plus
rien à l'âge où les enfants sont le plus difficiles.
C'est un échec complet.
Q : Il
y a des choses concernant la précédente décentralisation
qui étaient en fait du domaine de la déconcentration. Je
voudrais savoir ce qu'il en est aujourd'hui de cette deuxième décentralisation.?
R :
La marge entre déconcentration
et décentralisation est difficile à définir clairement.
La première décentralisation a été peu claire
dans les compétences de chaque collectivité. La seconde
répartit plus clairement les compétences de chacun. On sait
maintenant très clairement ce qui est du ressort de la Commune,
du Département et de la Région.
Après il va falloir lutter contre les usages.
Dans l'enseignement, où est la limite entre l'Etat et la collectivité
? On vous dit clairement que l'Etat est là pour donner un contenu
de programme, un contenu pédagogique et fournir les enseignants,
et que les collectivités sont là pour gérer les bâtiments
et pour faire du périscolaire.
Mais la réalité c'est que dans une école de ma ville
j'ai deux fois plus de personnel communal que de personnel de l'éducation
nationale : 10 classes = 10 instituteurs, plus en maternelle, 10 ATCEM
(personnel qualifié pour les petits) plus le personnel de service
pour l'entretien plus la gardienne plus le restaurant scolaire plus personnel
pour enseigner par exemple la musique, l'anglais.
Donc 10 instituteurs payés par le ministère
de l'Education Nationale pour 30 salariés de la commune.
Dans les collèges, ce n'est plus le problème du personnel
mais celui de l'intervention pédagogique, des études dirigées,
des ateliers pédagogiques. Il s'agit de personnel enseignant mais
c'est le département qui les paye ainsi que le matériel.
L'enseignement est l'exemple le plus caricatural, parce que l'Education
Nationale est une telle forteresse que c'est très difficile mais
on arrive cependant à la faire bouger. Mais lorsque j'ai voulu
mettre en place des médiateurs éducatifs dans les collèges
difficiles, lorsque je suis passée la première fois au Conseil
Départemental de l'Education Nationale avec uniquement des syndicalistes,
je me suis fait insulter, on me reprochait de démanteler le service
public
.mais cela fait maintenant 14 ans que cela fonctionne très
bien.
C'est un lent travail que d'ouvrir des portes en disant que l'Etat ne
sait pas répondre à certains problèmes et que nous
allons y répondre. Il est vrai que l'on casse le fameux mirage
de l'égalité entre les enfants, parce que tous les départements
n'ont pas les mêmes moyens mais aussi ne font pas forcément
le même choix politique.
Bien des départements ne mettent pas l'enseignement au premier
plan des priorités. Jusqu'où faut-il pousser la décentralisation,
je suis réservée sur le fait de le faire trop vite parce
que c'est quelque chose d'énorme.
Q :
Le Conseil
Général a fait des cadeaux en offrant du personnel complémentaire
dans les collèges, mais l'Education Nationale aurait pu refuser
dans un souci d'égalité
?
R : L'Education
Nationale n'a plus les moyens de refuser. Même si ça été
au début un rapport de forces, elle est obligée de travailler
avec nous parce qu'elle a de telles carences qu'on est bien obligé
de les combler.
Q : À
Levallois, vous vous êtes même attaquée à la
Région puisque nous y avons maintenant le plus beau lycée
de France.?
R :
C'est
une opération très particulière qui ne concerne que
la ville de Levallois parce que nous avions fait une ZAC (Zone d'Aménagement
Concertée). La ville de Levallois était bénéficiaire
et permettait de financer le Lycée, sachant que la Région
nous donnait une échéance de financement qui était
beaucoup trop loin pour la commune puisque c'était 2005, alors
que le collège a déjà 10 ans. Nous avons fait un
" appel à responsabilité " - procédure
particulière et dans le cadre de la ZAC, la commune a financé
la construction du lycée à 90%, la Région ne payant
que 10%. D'autre part dans le département nous avons encore un
certain nombre de cités scolaires (7 ou 8) qui sont très
difficiles à gérer (1200 élèves) et c'est
le CG qui les gère pour le compte de la Région, c'est-à-dire
que la Région vote le financement puisqu'il y a une partie de Lycée
mais c'est moi qui gère l'ensemble de ces cités et des travaux
relatifs.
C'est un bel exemple de coopération entre la Région et le
Conseil Général et bien la preuve qu'on arrive à
faire des trucs intelligents.
Q : Je
voudrais citer une expérience faite dans les Hts de Seine, mon
épouse forme des nourrices qui sont au chômage dans le cadre
d'un CAP Petite Enfance, selon un programme de formation financé
par le Conseil Général des Yvelines.
R :
Aujourd'hui avec les
femmes qui travaillent on manque partout de structures d'accueil pour
la petite enfance et dans toutes les communes il y a des listes d'attente
monstrueuses, il faut donc trouver de nouvelles formules. On participe
aussi beaucoup à la formation des assistantes maternelles, sachant
que l'assistante maternelle reçoit chez elle et pour obtenir l'agrément
il faut qu'elle ait un logement qui lui permette d'accueillir 3 enfants.
A Levallois, 280 assistantes maternelles. Compte tenu des rémunérations,
elles ne peuvent être logées que dans des logements sociaux
et grands. Donc il faut régler le problème de la formation
et celui du logement qui dans les Hauts de Seine n'est pas le plus facile
à résoudre.
Q :
d'une façon générale on dit
souvent qu'en France il y a un niveau de trop entre Commune, Région,
Département et Etat et si c'est vrai, quel niveau faudrait-il faire
disparaître ?
R : Vaste
débat, avec des positions qui bizarrement ne sont pas liées
aux clivages politiques. Je ne vais donc vous donner que ma réponse
:
Le premier niveau pour moi, c'est la ville, et comme je connais la province
je pense même que de très petites communes ont une raison
d'être. Il y a une proximité, une convivialité qui
sont efficaces et font aussi partie de la qualité de vie de ce
pays.
Après on a voulu faire des communautés de communes. On va
convenir que pour des communes de 30, 100, 150 habitants, nombreuses sur
les 36000 que compte la France, il peut être pertinent de faire
une économie de moyens dont elles manquent : pénurie de
moyens non seulement techniques mais aussi humains.
On a voulu l'imposer en Région Parisienne et Ile de France et là
cela devient une aberration.
Toutes les communautés de communes qui s'y sont créées
fonctionnent horriblement mal, parce que nous avons de grosses villes
qui ont des moyens suffisants en propre. Lorsqu'on a voulu l'imposer dans
les Hauts de Seine, les quelques communautés de communes qui ont
été créées ne cherchent maintenant que le
moyen juridique d'en sortir tellement les relations y sont mauvaises.
Nicolas Sarkozy lorsqu'il était ministre de l'intérieur
avait imaginé une communauté de Communes de la boucle nord
du département. On a d'ailleurs délibéré là-dessus
à Levallois, et à Asnières. Quand Nicolas Sarkozy
est devenu Président du Conseil Général on a laissé
tomber l'idée quand on s'est aperçu qu'elle avait beaucoup
d'inconvénients et aucun avantage. En zones très urbanisées
et surtout en Ile de France la Communauté de Communes n'est pas
très pertinente.
Le Conseil Général est le dernier échelon encore
perceptible par un administré parce que l'on a des domaines de
compétences où l'on est en contact direct avec eux (collèges,
voirie
). Enfin la Région est une espèce de nébuleuse
plus vaste et plus compliquée, c'est une grosse administration
qui dans son fonctionnement commence à ressembler, tout du moins
pour la région Ile de France, à un service d'Etat.
Je prends mon homologue à la Région qui est vice-président
chargée des Lycées, socialiste et une amie puisque conseiller
municipal à Levallois. Elle me dit " tu ne te rends pas compte
l'autonomie que tu as, de la liberté que tu as, de ta capacité
à faire bouger tes services, moi entre le moment où je demande
quelque chose et le moment où j'obtiens satisfaction, il s'est
passé 6 mois.. ". Donc moi c'est plutôt la Région
que je supprimerais. Mais j'ai quelques valeureux collègues et
notamment les élus régionaux qui vont vous faire la même
démonstration à l'envers et vous dire que c'est le département
qu'il faut supprimer. Mais moi j'aime la proximité et pouvoir agir
sur l'événement.
Q : C'est
vrai que la Région est mal perçue mais au niveau de l'Europe
la plupart des choses ne se traitent elles pas au niveau des régions
?
R :
Les
Conseils Généraux pourraient tout aussi bien travailler
avec l'Europe.
Q : En
ce qui concerne la Communauté de Communes, (l'intercommunalité),
au Vésinet en décembre dernier a été votée
la création d'une intercommunalité entre Le Vésinet,
Sartrouville, Chatou et toute cette région de la boucle de la Seine.
Le Préfet, après avoir délibéré avec
les conseillers municipaux a refusé de signer la création
de la Communauté de Communes parce que les impôts n'avaient
pas été votés. C'était en contradiction avec
ce qu'avait dit le Président de la République, qu'on n'allait
pas augmenter les impôts parce que l'on faisait une structure supplémentaire.
R :
A Levallois, c'est
le contraire, nous nous étions lancés dans la Communauté
de Communes parce vous savez qu'il y a un impôt solidarité
entre les communes et c'était vraiment équitable puisque
nous étions 8 villes riches (dont la mienne) des Hauts de Seine,
à payer pour tous les (200)
autres
.
Il y a eu une première tranche et on avait dit qu'on trouvait ça
normal et puis les socialistes nous ont collé une deuxième
tranche qui, elle, est exponentielle et qu'on n'arrive plus à payer.
A force de faire payer les riches, ils deviennent pauvres. Et il se trouve
que dans la loi sur l' inter-communalité, en étant en inter-communalité
on échappait à cette deuxième tranche.
Comme d'habitude en France on fait une loi, puis on n'a pas le courage
de dire qu'elle n'est pas bonne et donc on fait une deuxième loi
qui contourne la première.
Dans le même temps ils ont " repatouillé " la taxe
professionnelle et du coup de riche on s'est trouvé pauvre et du
fait on ne paie plus. Donc maintenant nous n'avons plus besoin de nous
embêter avec une intercommunalité de 450 000 habitants car
nous allions monter une usine à gaz et il fallait avoir beaucoup
d'imagination pour découvrir les rares points où elle aurait
pu amener d'hypothétiques améliorations, qui auraient probablement
même pas couvert les augmentations de frais de fonctionnement.
HB
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