RENCONTRE DU 8 SEPTEMBRE 2004
Invité : M. Jacques KOSSOWSKI
DEPUTE MAIRE DE COURBEVOIE

 

Monsieur Jacques KOSSOWSKI est maire de Courbevoie depuis 1995, et Député des Hauts de Seine depuis 1997.

Il nous a déjà fait l'honneur de participer à notre réunions en avril 1997,

Intervention de Jacques KOSSOWSKI

Quand je suis venu ici la dernière fois en 97, je venais d'être élu député grâce à M. Juppé qui avait fait la dissolution. J'étais maire de Courbevoie depuis 95.
Lorsque je fais de la politique ce n'est pas dans l'optique de gagner des électeurs, c'est parce que je crois à une idée et que je la défends. Elle plait ou elle ne plait pas.

LA POLITIQUE NATIONALE
Quand on a parlé des retraites, on savait que si on ne faisait rien, dans quelques années on ne pourrait plus les payer. Les décisions prises n'étaient peut-être pas très électorales. L'observatoire des retraites mis en place permettra de voir dans les 5 ou 6 ans à venir si ce qui était prévu dans la loi était bon. Ce qu'une loi fait, une autre loi peut le défaire.
Pour la Sécurité Sociale, on fait ce qu'on pensait devoir faire dans l'intérêt de la nation et tant pis si on a perdu les élections régionales.
C'est la même chose pour la politique locale.

Je suis membre de la commission des affaires culturelles familiales et sociales de l'Assemblée.
Ce matin, je suis intervenu sur BFM, entre autres sur le droit de grève. Le droit de grève doit être respecté, mais il faut que lorsqu'on veut aller travailler, on ait aussi la possibilité de le faire.
J'ai déposé une proposition de loi en juillet 2002 sur le " service garanti " (et non le " service minimum "). Aujourd'hui, le " service minimum " existe. Le " service garanti ", c'est de permettre à chaque salarié d'aller travailler et de rentrer chez lui. Cette proposition de loi a recueilli 310 signatures sur 567 députés, c'est dire la majorité. Elle n'a toujours pas eu de suite. Mais l'ordre du jour de l'assemblée dépend uniquement de la décision du gouvernement.
J'ai déposé en juillet 2003 une seconde proposition de loi, visant à permettre l'inscription à l'ordre du jour des propositions de loi présentées par la majorité des membres de l'Assemblée nationale ou du Sénat. Mais là je n'ai encore que 170 signatures, ce qui veut dire qu'il va falloir convaincre les députés de nous rejoindre.
Même si chez le Premier Ministre on m'a opposé l'argument : " cela fait changer l'idée du parlement ", je ne pense pas que cela donne un pouvoir de plus au parlement et aux députés, sinon nous ne serions qu'une chambre d'enregistrement.
Ma façon de parler a surpris dans la mesure où c'est mon parti politique qui est au pouvoir, mais cela ne change rien à mon envie de dire les choses comme je les pense.
Si nous voulons que les Français adhèrent à nouveau à la politique, il faut qu'ils sentent qu'il y a au parlement des hommes et des femmes qui puissent dire "je ne veux pas ce genre de politique, j'ai un pouvoir et je fais signer une proposition de loi". Si elle est signée, alors le ministre doit vous écouter et on doit au moins en débattre.
L'association " les contribuables associés " m'a beaucoup aidé dans cette démarche.
J'ai été chef d'entreprise et je connais aussi les problèmes des salariés bien que ceux ci aient beaucoup évolué.
Un patron, c'est celui qui possède son entreprise. Je préfère parler de dirigeant, car peu de dirigeants aujourd'hui possèdent l'entreprise qu'ils dirigent, et ils peuvent être remerciés, eux aussi, du jour au lendemain. La grande différence avec le salarié lambda, c'est qu'ils ne partent pas sans rien. On est tous des travailleurs, mais des cas du type de Messier ont fait beaucoup de mal.

LA POLITIQUE LOCALE
J'ai été élu au conseil municipal en 1983. Mais à ce niveau on ne maîtrise pas tout.
1995-2001 c'est mon premier mandat de maire. D'abord on apprend, en regardant ce que le prédécesseur a fait et on essaie de changer un peu la donne.
2001-2007, second mandat. On a commencé à entrevoir ce que l'on va faire et ce que l'on va développer pour les 10 ou 15 ans à venir. En 10 ans, la population a fortement changé : renouvellement d'une population (25-35-40 ans surtout), qui a surtout une attitudede consommateur et à qui il faut pouvoir donner satisfaction.
2007-2013, si les électeurs le décident, on aura un troisième mandat pour achever ce qui est en cours et lancer la suite.

En politique, il ne faut pas vouloir se maintenir à tout prix et savoir passer la main. Les électeurs décident. Lorsqu'ils n'ont plus besoin de vous, ils vous le font savoir. C'est la différence fondamentale entre le salarié et le politique.

Pour développer Courbevoie, il fallait faire une charte de l'environnement.
Sur la Défense 3 Millions et demi de mêtres carrés de bureaux, 75 000 habitants et environ 80 000 salariés. Il fallait prévoir une certaine qualité de vie.
Requalifier les berges de la Seine, développer le parc de Bécon, l'Avenue Gambetta après le départ du viaduc, et le Boulevard de Verdun. prévoir l'arrivée du tramway qui doit venir Boulevard de la Mission Marchand et rechercher des espaces verts. Nous en avons acheté sur le territoire de l'EPAD, 1 hectare quartier du Faubourg de l'arche, au prix du terrain à construire.
Le nouveau PLU (Plan local d'urbanisme) pour 10-15 ans qui viennent, nous allons en parler dans les quartiers.
Quand je suis arrivé, nous avions 6 hectares de zone pavillonnaire. Nous en avons aujourd'hui 36.
Avec le Faubourg de l'Arche, une ZAC de 36h lancée il y a une vingtaine d'années, aujourd'hui nous avons besoin d'aérer.
Il y a aussi une très forte demande pour des écoles et des crèches. Si le maire a obligation de faire des écoles il n'en a pas pour les crèches. A Courbevoie, nous gardons chaque jour 1300 enfants, sans compter une allocation municipale que j'ai créé il y a à peu près 5 ans, qui représente 1 100 000 € par an (qui permet d'accueillir 750 enfants de plus) et dont les parents peuvent bénéficier sans condition de ressource.
Je souhaite créer des crèches dans les entreprises en en payant les frais de fonctionnement. Mais ce n'est pas parce qu'une entreprise a un local de 150 m2 qu'on va pouvoir tout de suite mettre des berceaux. Il y a toute une hygiène et sécurité à mettre en place. Nous participerons aux frais de fonctionnement, pour les enfants dont les parents habitent Courbevoie, laissant à la charge des entreprises les frais d'investissement. Le gouvernement a proposé 50 à 60% d'aide pour ces entreprises. La possibilité pour le salarié de poser son enfant le matin et le reprendre le soir est bénéfique tant pour l'entreprise que pour les parents.

 

QUESTIONS DES PARTICIPANTS :


Nota : Ce système de crèche dans l'entreprise a été évoqué voici quelques temps ici même. Notre groupement avait même envisagé de le proposer aux mairies de Puteaux et de Courbevoie. Mais le fait que la très grande majorité des salariés de La Défense ne résident pas dans ces communes nous a retenus dans cette démarche.

Q: La crèche dans l'entreprise est elle une solution ? Devoir transporter un bébé dans de longs trajets de transports en commun n'est sans doute pas la meilleure solution pour lui. Faut il aussi que les installations soient adéquates ?
R : Ce n'est pas parce qu'il y a une crèche que vous êtes obligé d'y mettre votre enfant. Tant mieux si vous avez trouvé une meilleure solution. Toutefois, ce genre de solution si elle ne convient pas à tout le monde est généralement bien accueillie et utilisée. Quant à l'installation, elle suit des règles très strictes et le contrôle de la DDAS.

Nota : Dans le cadre d'une entreprise on peut imaginer que les horaires puissent être assouplis pour les besoins du personnel, par rapport à des structures plus administratives.

Il existe a IBM une structure qui s'appelle le " groupe Elles " qui se préoccupe de ce type de problème. L'équivalent existe aussi dans d'autres grandes entreprises. Ce groupe pourrait probablement apporter une aide précieuse à la municipalité de Courbevoie dans la mise en oeuvre de ce type de projet.

Q : La particularité de La Défense, est que le plus grand nombre de salariés travaillant sur le site n'y habitent pas. De plus, il y a de plus en plus de jeunes cadres qui rejoignent les entreprises de ce site qui ont des petits enfants pour lesquels le problème de garde se pose.
R : Il faut préciser que l'aide de la commune aux personnes qui mettent leurs enfants dans des crèches ne peut s'appliquer qu'à des habitants de Courbevoie.

Q : Dans une crèche, un enfant coûte 70€/jour, 50% est financé par la collectivité (la CAF, la mairie…) ; il reste 30€/j pour la famille.
Je propose de travailler ensemble et rassembler nos idées et explorer toutes les solutions.
R : Nous travaillons beaucoup avec le conseil général. Nous allons dans les entreprises pour voir si cela fonctionne et si cela ne fonctionne pas, on fait remonter à l'échelon national mais autant commencer par l'échelon local.

Q : On pourrait aussi vous reprocher de faire financer une partie des crèches par les entreprises qui ont leur siège social à la défense, mais dont beaucoup de salariés ne travaillent pas à Courbevoie.
R : Oui mais comment expliquer à 800 parents que nous allons aider des personnes qui n'habitent pas à Courbevoie. Il faudrait instaurer un échange entre les communes.
Nota : Il s'agit là d'un problème qui devrait sérieusement être étudié et résolu, car si les salariés de ces entreprises ne résident pour la plupart ni à Puteaux ni à Courbevoie, l'essentiel des ressources de ces communes proviennent tout de même de ces entreprises à travers les taxes qu'elles leur versent.

Q : Vous avez parlé des propositions de lois. Beaucoup de lois sont votées, s'accumulent, mais ne sont pas toujours appliquées. (voir le livre de Thierry Desjardin : Cessez d'emmerder les Français). Dans certains pays, on applique le principe du " volume constant ", ce qui veut dire qu'on ne peut pas émettre une loi si on n'en a pas retiré une autre. Actuellement il y a plus de 500 000 lois décrets arrêtés et règlements. N'y a-t-il pas quelque chose à faire ?
R : Tout d'abord, il faudrait que les lois votées soient appliquées, si le décret d'application n'est pas signé, elle reste lettre morte. Cela s'est passé par exemple avec les lois de Charles Pasqua sur la sécurité. C'est vrai qu'il faudrait faire du ménage.

Q : Certaines lois bien que complétées par leur décret d'application se retrouvent rapidement obsolètes, quand elles ne sont pas en contradiction avec d'autres lois ou règlements toujours en vigueur.
R : Dés qu'une loi est votée, il faudrait que le décret d'application soit signé rapidement et non pas un ou deux ans après.

Q : En ce moment, de nombreux salariés sont inquiets car il semble que les projets et propositions à l'assemblée soient de nature à risquer de détruire tout l'édifice du code du travail qui protége le travail salarié. Vrai ou faux, l'image qui ressort des media est que le parti au pouvoir est à l'écoute exclusive du MEDEF. Cela est quelque peu choquant. Comment vivez vous cela ?
R : Pour moi, la politique, c'est défendre des idées. Ensuite qu'est-ce que je pense du MEDEF ? Je ne voudrais pas être désagréable mais les gens qui nous parlent du MEDEF sont souvent nos collègues communistes qui disent de nous que nous sommes les " porte valise du baron ". Il est vrai que certains députés sont très liés avec le MEDEF, mais c'est une infime minorité qui n'a pas toujours droit au chapitre. Nous sommes d'ailleurs souvent en désaccord avec le MEDEF. Lorsque nous avons des amendements à des projets de loi à faire passer, il est exact que c'est parfois difficile du fait de pressions vis-à-vis des ministres. Je suis opposé à me laisser imposer quoi que ce soit, mais je souhaite toujours que l'on se mette autour d'une table pour en parler. Que le Président du MEDEF ait des relations avec le ministre actuel des finances, sans aucun doute. Je ne peux pas vous répondre à sa place. Mais s'il veut un jour être Président de la République, il y a certaines orientations qu'il lui faudra changer. Les salariés représentent l'essentiel de la richesse de ce pays.
En 97, j'avais demandé que des cadres de 54-55 ans puissent rester dans certaines entreprises pour préparer des remplaçants et on m'avait répondu qu'ayant de nouvelles méthodes on préférait changer les gens pour ne pas risquer de rester dans les anciennes méthodes. Je reçois parfois des personnes à qui dit qu'ils sont trop vieux ; je leur dis, perdu pour perdu, répondez " pensez qu'un jour vous aurez mon age ". En tout cas je pense que si le MEDEF continue sur cette voie, on n'ira pas loin.
Je suis toujours surpris quand je vois certaines entreprises qui ont reçu des aides de l'Etat et maintenant délocalisent. Tout comme le chantage : il faut revenir à 39h sinon on délocalise. Ce n'est pas acceptable et je pense qu'on n'est pas obligé de dire toujours amen.

Q : Dans les années 70, Chaban Delmas avait financé l'implantation de l'usine Siemens à Lormon. 15 ans plus tard les allemands décident de délocaliser 200 emplois en Asie. J'étais alors Secrétaire du Comité d'Entreprise. Toutes les organisations syndicales ont demandé l'organisation d'un CCE à Bordeaux ; nous avons rencontré les élus locaux et nous avons dit que cette délocalisation sauvage était une trahison des promesses faites 20 ans auparavant de développer l'emploi dans la région de Bordeaux. Nous avons été jusqu'à Munich pour manifester et finalement il y a eu retour en arrière et nous avons ainsi sauvé 200 emplois.
Le Président Directeur Général à la retraite de Motorola me disait qu'à une époque, les américains voulaient fermer une usine à Toulouse. En se battant il avait évité cela et qu'on avait même ensuite ouvert une usine à Grenoble
R : Le gouvernement souhaite demander aux entreprises qui ont reçu une aide et qui décideraient de délocaliser, de rembourser une partie de ce qu'elles ont perçu au prorata du temps où elles sont restées en France. L'idée est lancée, mais je ne sais pas comment elle va être mise en œuvre.

Q : IBM a signé un très gros contrat avec un très gros client. L'équipe informatique qui pilotait le projet se trouvait en Inde et de ce fait le client devait communiquer en langue anglaise alors qu'il avait signé un contrat franco-français et qu'il ne pouvait pas exiger de ses employés qu'ils parlent couramment anglais. La semaine suivante, IBM a répondu en nommant une nouvelle équipe en Tunisie.
R : On a connu des déboires semblables ici, par exemple Rhône-Poulenc est parti et avant que le Crédit Agricole ne le remplace, pendant 4 ou 5 ans, la commune n'a plus touché la taxe professionnelle et on a été obligé de faire des économies.

Q : Aux dernières régionales, dans Les Yvelines sur les 16 candidats, 3 seulement avaient un programme. Les autres demandaient de voter pour eux parce qu'ils se disaient capable de gérer la région.
R : Bien sûr il faut avoir un programme. Mais il faut voir le bon côté de la démocratie où tout le monde peut se présenter. Il faudrait peut-être revoir les sources de financement. Retrouver 25 candidats aux élections présidentielles, cela n'est pas sérieux

Q : Technip a déménagé et s'est installé tour Adria dans le Faubourg de l'Arche. Le personnel doit emprunter une passerelle pour piéton qui surplombe le boulevard circulaire. Les Comité d'entreprise et CHSCT abordent le problème de la dangerosité de cette passerelle. Cette passerelle est elle aux normes, est-elle provisoire, y a t il un projet de remplacement par une passerelle définitive ?
R : Cette fameuse passerelle est bloquée parce que la ville de Puteaux fait des recours. Il y a à peu près un an nous avons eu la possibilité de déclasser une voie communale en voie nationale, (unique en France car cela ne s'était jamais fait). Ce déclassement a eu lieu et nous avons pu retrouver les entreprises qu'on avait complètement abandonnées pour relancer les travaux mais la ville de Puteaux a attaqué à nouveau ce décret en Conseil d'Etat. Comme ce recours n'est pas suspensif, si les entreprises sont d'accord pour reprendre les travaux, début janvier nous les relançons pour aller jusqu'au Pouce de César. Dans 18 mois cela devrait être terminé. Mais de toute façon la passerelle est aux normes sinon la DDE n'aurait pas permis de le faire.

Q : L'EPAD, est une structure appelée à disparaître. Que se passera-t-il après ?
R : Normalement l'EPAD doit durer jusqu'en 2007 (c'est le souhait du gouvernement. Si on ne prolonge pas, il faut trouver une autre entité juridique. La meilleure serait constituée avec les villes de Puteaux, de Courbevoie et le Conseil Général. Nous avons demandé un audit de toutes les infrastructures du côté de Courbevoie, de Puteaux. L'Etat et le Conseil Général en ont demandé un également. Nous espérons que nous pourrons nous entendre avec le nouveau maire de Puteaux.

Q : Actuellement les impôts des entreprises de la Défense sont versés aux communes. Le domaine géré et entretenu par l'EPAD est situé sur les communes de Puteaux et Courbevoie. Or les revenus de l'EPAD mis à part les parkings payants, se résument essentiellement aux droits liés aux nouvelles constructions. Ce qui a entraîné une frénésie de construction en particulier de bureaux, sans prendre en compte les problèmes de transport pour les usagers qui deviennent de plus en plus critiques.
R : Les recettes de l'EPAD viennent des parkings et de ce que les villes peuvent donner. Si l'EPAD disparaît, il faut que les villes subventionnent et il faut créer une entité. Mais si dans 20-30 ans une passerelle venait à s'effondrer, personne, à part l'Etat, ne serait capable de subventionner de tels travaux. Certes,
L'intercommunalité est une des solutions, mais Courbevoie a tout à y perdre parce que c'est nous qui apportons tout. Le Conseiller Général propose de faire une intercommunalité à 12 ou 14 communes. Mais c'est 40% du département. La solution risque d'être imposée dans l'avenir pour pouvoir bénéficier des aides de l'Etat, mais la meilleure solution serait quand même avec Puteaux.

H B