RENCONTRE DU 5 OCTOBRE 2000
Invité : M.SERGE CIMMATI.
PRESIDENT DE LA F A S.

INTERVENTION DE SERGE CIMMATI


La F.A.S. représente aujourd'hui 17 associations regroupant 30.000 adhérents.
La première à été créée en 1986 chez ELF suivie par Saint-Gobain en 1987. Ces associations essaient de promouvoir et développer l'actionnariat salarié.
En 1993 plusieurs associations se sont regroupées pour former la Fédération Française des Associations d'Actionnaires Salariés. Nous espérons rapidement dépasser le chiffre de 20. Nous n'avons pas toujours le même discours que vous dans les différents organes de décision et de gestion mais notre souci à tous est de défendre les droits des actionnaires salariés. Il y a des associations de grandes entreprises, mais également de PME ( la société d'économie mixte Gaz et Electricité de Grenoble : 400 salariés dont 300 sont actionnaires, avec une représentation au Conseil d'Administration).
Nous considérons nos associations indépendantes de toute idéologie patronale. Nous avons besoin de l'entreprise pour vivre. Nous avons peu de moyen, c'est la raison pour laquelle nous menons peu d'actions. Nous sommes soumis au bon vouloir de l'entreprise. On réunit toutes les sensibilités politiques et syndicales de l'entreprise, que nous ne mettons pas en avant. Nous avons tous une logique patrimoniale.

NOS OBJECTIFS : développer l'actionnariat salarié et accompagner les associations dans toutes leurs démarches. Nous avons fait 10 propositions sur les thèmes suivants :
Les droits fondamentaux :
Ils reposent sur le principe que, l'actionnaire salarié est un actionnaire à part entière. Les structures collectives ne doivent pas faire obstacle à l'exercice des droits des actionnaires. Lorsque les fonds sont diversifiés (actions, obligations, SICAV) nous pensons qu'il n'est pas anormal que les membres du conseil soient désignés paritairement par l'entreprise et les organisations syndicales. Car ce sont des fonds qui captent l'intéressement, la participation, qui sont des accords négociés. Dans les fonds qui détiennent exclusivement des titres de l'entreprise, les membres du Conseil de Surveillance doivent être élus. Une enquête faite récemment auprès des actionnaires salariés fait ressortir que majoritairement ils tiennent à voter eux-mêmes ; à être présents dans les Conseils de Surveillance et dans les Conseils d'Administration ; à choisir eux-mêmes leurs représentants dans les différents organes de gestion. C'est la raison d'être de nos associations, et nous oeuvrons afin que le législateur les reconnaisse comme interlocuteur à ce niveau.

Le droit de vote :
Il y a 3 droits inaliénables associés au titre de propriété : le droit à l'information, au dividende et au droit de vote. Si on enlève le droit de vote on considère l'actionnaire salarié comme un simple épargnant. Les actionnaires salariés qui possèdent souvent entre 3 et 5% du capital de leur entreprise doivent avoir les droits correspondants à leur propriété. S'ils n'ont pas la possibilité de choisir leur mandants qui les représenteraient au conseil de surveillance de ces fonds, qui eux même pourraient les représenter à l'Assemblée Générale, il faut qu'ils puissent récupérer leurs droits de vote pour les Assemblées Générales de leur entreprise.

Le droit de disposer en cas d'OPE / OPA:
En cas d'offre publique OPE/OPA sur une entreprise, il faut que les actionnaires salariés puissent porter eux-mêmes leurs droits de vote. Ils sont concernés au titre de leur patrimoine et de leur emploi.

La représentation dans les conseils de surveillance:
A partir de 3% il faut obligatoirement qu'il y ait un représentant des actionnaires salariés dans le Conseil d'Administration de la société, élu par les actionnaires salariés eux-mêmes, selon un principe à double tour et non désigné par le Président.

La participation aux augmentations de capital :
Il faut arrêter de dire que 40% des entreprises sont entre les mains des Fonds de Pension. Que l'on donne systématiquement à chaque augmentation de capital la possibilité aux salariés d'avoir 5% de l'augmentation de capital, cela permettrait d'avoir un peu plus d'actionnaires salariés des capitaux français et de l'entreprise. Ce ne sont toutefois pas nos 40 ou 100 milliards qui feront le pendant aux Fonds de Pensions qui représentent aujourd'hui 50.000 milliards de $.

Le champ d'application :
Il doit s'étendre à toutes les PME
L'harmonisation internationale.
Nous communiquons sur ce sujet auprès des politiques (parlementaires ou gouvernementaux) des médias, du grand public (participation à des débats, colloques séminaires) et par le biais de notre site Internet. Je rencontre des chefs d'entreprises pour assurer un développement de l'actionnariat salarié et une certaine représentation à travers les associations.

L'indice IAS (Indice Actionnariat Salarié) /
Il a été créé en octobre 1999 sous l'égide de la FAS. Le Président des actionnaires salariés de Bull à l'époque, a énormément travaillé sur la mise en place de cet indice. 29 sociétés répondaient aux critères exigés ; 25% du personnel devaient détenir plus de 3% du capital de l'entreprise, celle-ci devant appartenir aux indices phares de la Bourse (type CAC40, SBF 120 ou 250). Aujourd'hui un comité scientifique examine les entrées et les sorties. Cet indice est côté à la Bourse. Depuis le début de l'année il s'appuie sur 33 sociétés et "sur-performe" de plus de 5% les autres indices. On dit qu'il y a une corrélation très forte entre la présence d'actionnaires salariés significative dans l'entreprise et la performance de l'entreprise.

Mi-Novembre nous diffuserons (à 100.000 exemplaires) un guide pratique de l'actionnaire salarié.
Ceux ci ont souvent très peu de connaissance du monde financier et économique. Ce guide que nous souhaitons pédagogue sera donné gratuitement au Salon de l'Actionnariat et aux associations adhérentes. Il est financé par des annonceurs.

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QUESTIONS DES PARTICIPANTS :

 

Q : Les droits de vote doivent être exercés par les porteurs de parts ou par le Conseil de surveillance dans la mesure où le Conseil est élu par les porteurs de parts. Tout ce qui est fait en terme d'actionnariat, d'épargne salariale doit avoir son pendant en terme de pouvoir dans l'entreprise.
Il y a un vrai problème de comportement de certaines associations qui, ont pris contact avec des Fonds de Pension qui leur ont laissé leurs droits de vote et de ce fait représentent plus ces fonds que les salariés.
Par ailleurs, certaines organisations syndicales affichent des doctrines opposées au capitalisme, et par conséquent à l'actionnariat.
R : Dans des entreprises comme France - Telecom, la CGT et SUD qui sont dans ce cas représentent plus de 55%, ce qui n'empêche pas l'existence un actionnariat salarié important.

Q : L'association des actionnaires salariés du Crédit Lyonnais a été créée en 1993. Les associations d'actionnaires salariés sont des associations Loi 1901 qui font appel au bénévolat. Certaines sont à la botte de la direction (elles sont généralement moribondes). Nous avons un objectif commun avec la direction du Crédit Lyonnais : défendre l'autonomie et la pérennité des décisions prises.
L'entreprise qui abonde à hauteur de 20 ou 30% ne peut elle pas exiger des contreparties, soit en ne donnant pas de droit de vote, soit en le donnant proportionnellement ? C'est une négociation au départ. L'actionnariat salarié est une préoccupation dans les entreprises qui ont été privatisées, et dans des entreprises en expansion. Il n'en est pas de même pour celles qui se battent pour leur survie.
R : La contrepartie à l'abondement et à la décote existe : c'est le blocage de ces actions pendant un temps qui peut varier de 2 à 5 ans ou plus.

Q : Chez Saint-Gobain Cie Holding, nous sommes 220 personnes sur un groupe de 183.000, qui est géré société par société. Dans le groupe il y a un Fonds Commun de Placement géré par un Conseil Surveillance élu, sur listes (syndicales et non syndicales). De tradition c'est une liste non syndicale qui a toujours eu la majorité des sièges au Conseil de Surveillance. De par les statuts, le Président de ce Conseil de Surveillance du Fonds Commun de Placement est membre du Conseil d'Administration. Aujourd'hui il représente 6,04% des actions et 8,25% des droits de vote, les statuts stipulant que les actions du Fonds Commun de Placement ont des droits de vote double. L'objectif du groupe est que le personnel détienne 10% des actions et 15% des droits de vote et, ainsi faire échec à des comportements aberrants de Fonds de Pension. Avec 6% nous sommes le premier actionnaire de Saint-Gobain. Aucun des Fonds de Pension n'en a autant que nous, mais réunis ils détiennent 40%. Si demain ils font eux-mêmes une association et présentent une personne au Conseil d'Administration ils feront ce qu'il voudront.
Donner la représentation au CA du Président du Conseil de Surveillance ne nous garantit pas qu'il représente correctement les aspirations de chacun des actionnaires salariés. Il faudrait peut-être qu'il y ait un actionnariat salarié élu en direct. Le groupe n'y est pas opposé ; il attend une Loi de Bruxelles.
Suite à la dénationalisation de Saint-Gobain il y avait un administrateur élu par les seuls salariés de la compagnie. Par décision du Conseil d'Administration de mars 2000 cette dérogation a sauté ; 2 représentants du CE les remplacent. Tant que le PDG français ne sera pas un Chief Executive Officer avec un Board et des administrateurs qui ont le pouvoir de le débarquer, il fera tout ce qu'il veut.
R : L'actionnariat salarié n'est pas une panacée. Je suis plus salarié qu'actionnaire. Mon premier souci c'est mon emploi.

Q : En 1983 j'avais appelé à la création d'une association intersyndicale d'actionnaires salariés chez ELF. En 1986 la FAS a été créée. Dans les CA les salariés doivent être représentés en tant que tels par des administrateurs élus par un corps électoral formé de l'ensemble des salariés porteurs de parts. Dès lors que les actionnaires salariés détiennent un certain % de l'entreprise ils doivent pouvoir élire leurs représentants et ne pas se voir confisquer le pouvoir de cette représentation, par la direction ou par un Conseil de PEG dont les nominations seraient illégitimes. Si les salariés actionnaires s'organisent entre eux ils peuvent exercer dans les assemblées un contrôle et un pouvoir considérable. Il faut organiser l'exercice des pouvoirs individuels et les fédérer. Il n'y a pas d'antinomie entre les associations d'actionnaires salariés et les Fonds de Pension à partir du moment où les associations seront reconnues comme des partenaires matures, capables d'analyser les situations et de défendre sur le long terme les intérêts de l'entreprise et du personnel. Pourquoi les Fonds de Pension ne remettraient-ils pas leurs pouvoirs aux associations qui les exerceraient avec un sentiment d'objectivité. Le Président d'un groupe reçoit de nombreux pouvoirs en blanc. On ne sait pas comment il les exerce. L'AVAS (une des associations d'actionnaires salariés de Elf) a réussi à faire mettre aux voix en A.G. des résolutions avec l'appui des Fonds de Pension.
R : le risque soulevé par une des questions précédentes est que cet appui de "fonds de pension" se monnaie contre l'intérêt de l'actionnaire salarié en tant que salarié. Il faut rappeler également la confusion généralement faite entre "fonds de pension" et "fonds de placement" les premiers recherchant le rapport des placements dans la pérennité, les seconds cherchant plus souvent le rendement à court et moyen terme.

Q : Le Président de VIVENDI a expliqué que, pour suivre des directives européennes la décote passerait l'année prochaine de 20% à 15%. Pourrait-on obliger les entreprises à renégocier l'abondement ?
R : Dans le projet de loi sur l'épargne salariale le PPESV (Plan Partenariat et Epargne Salariale Volontaire) autorise une décote allant jusqu'à 30% - et un blocage sur 10 ans. Mais chaque pays a sa réglementation propre et sa fiscalité

info: EPARGNE SALARIALE :
Le projet de loi qui vient de passer en première lecture à l'assemblée n'a pas repris l'ensemble des recommandations du rapport Balligand - de Foucauld. Les débats ont été surtout axés sur les problèmes de fiscalité.
A craindre : que le rêve de certains se réalise : "votre argent nous intéresse mais pas vous"
Le projet est à l'ordre du jour du Sénat début Novembre.

H B